La loi Badinter du 5 juillet 1985 est mise en place pour protéger les individus impliqués dans des accidents de circulation : que ce soit les conducteurs, les piétons ou les passagers. Elle a pour objectif d’améliorer le processus d’indemnisation et de réduire les délais qui étaient auparavant trop longs. Quels sont les cas d’application de cette loi ? De quelle manière les victimes d’accidents de la route sont-elles indemnisées ? Les piétons entrent-ils dans le cadre de cette protection ? Voici un aperçu détaillé.
Explication de la loi Badinter relative à l’assurance automobile
Adoptée le 5 juillet 1985, la loi Badinter a pour but d’optimiser et de hâter le processus d’indemnisation pour les victimes d’accidents de la route sur le territoire français. Elle instaure un « droit à indemnisation » pour l’ensemble des préjudices résultant d’un accident de la route. Avec ses 5 articles clés, cette réglementation introduit diverses dispositions qui améliorent l’ancien système d’indemnisation, insuffisant pour les victimes. L’assureur est obligé de notifier à son assuré, victime d’un accident, ses droits et de lui proposer une offre d’indemnisation dans un délai de 8 mois à partir de l’accident. Cette offre couvre tant les dommages corporels que matériels.
Sous l’impulsion de Robert Badinter, ministre de la justice de l’époque, cette loi a significativement consolidé la législation régissant l’assurance automobile. Son intégration au Code des assurances en 1988 a permis une meilleure adéquation avec son champ d’application.
Quels sont les principes retenus par la loi Badinter sur les accidents de circulation ?
Cette loi comprend cinq articles clés qui définissent les modalités d’indemnisation pour les sinistrés des accidents de la route :
- L’article 1 détermine le cadre d’application de cette réglementation.
- L’article 2 énonce que « les sinistrés, y compris les conducteurs, ne peuvent se voir refuser l’indemnisation sur le fondement de cas de force majeure ou du fait d’un tiers par le conducteur ou le détenteur d’un véhicule« . La force majeure, telle que définie par la jurisprudence, est un évènement inattendu, irrésistible et externe. En situation d’accident, ni le conducteur ni le propriétaire du véhicule ne peuvent se soustraire à leur obligation d’indemnisation en argumentant un cas de force majeure ou l’intervention d’un tiers.
- Selon l’article 3, tous les sinistrés à l’exception des conducteurs, « seront compensés pour les préjudices physiques subis sans que leur faute puisse être prise en compte, sauf en cas de faute inexcusable de leur part ayant uniquement causé l’accident ». Autrement dit, les victimes des accidents de la route (à l’exception des conducteurs) bénéficieront d’une indemnisation automatique, sauf si un accident résulte exclusivement de leur propre faute inexcusable.
- Conformément à l’article 4, « La faute commise par le pilote du véhicule terrestre à moteur impacte directement le niveau d’indemnisation des dommages qu’il subit » : cela signifie que les conducteurs peuvent obtenir une compensation intégrale, partielle ou nulle, en fonction de la faute qu’ils ont commise.
- L’article 5 aborde la question de la compensation pour les dommages matériels : quel que soit le statut de la victime (conducteur, passager, piéton), les erreurs commises affectent l’indemnisation des dégâts matériels subis. Exceptionnellement, les objets médicaux prescrits (lunettes, prothèses) sont compensés de la même manière que les dommages corporels. De plus, le propriétaire d’un véhicule impliqué dans un sinistre peut réclamer un dédommagement auprès du conducteur en charge de son véhicule au moment des faits.
La faute inexcusable est définie comme une conduite volontaire d’une gravité exceptionnelle, mettant son auteur face à un risque évident dont il aurait dû être conscient, comme par exemple, l’acte d’un passager décidant de se jeter d’un véhicule en mouvement.
Articles | Que prévoit l’article ? | Périmètre d’application |
---|---|---|
Article 1 | Application de l’indemnisation pour les victimes d’accident de la route impliquant un véhicule. | Exceptés trains et tramways. |
Article 2 | Impossibilité d’invoquer le cas de force majeure ou l’intervention d’un tiers. | Applicable à tous, y compris les conducteurs. |
Article 3 | Indemnisation des dommages corporels pour les victimes autres que les conducteurs. | Excepté en cas de faute inexcusable ou de recherche volontaire du sinistre. |
Article 4 | L’ampleur de la faute du conducteur influence directement son indemnisation. | Compensation complète, partielle ou nulle. |
Article 5 | Indemnisation partielle ou nulle des dommages matériels selon la faute commise. | Valable pour tous. Conditionnée par la faute. |
Que dit la loi Badinter sur l’indemnisation des victimes d’accidents de la route ?
L’indemnisation des non-conducteurs
Les non-conducteurs victimes reçoivent systématiquement une indemnisation, à moins que le dommage n’ait été causé intentionnellement. Suite à un incident de la route, la compagnie d’assurance élabore une proposition d’indemnisation pour la victime, incluant à la fois les dommages corporels et matériels. Elle a un délai de 8 mois suivant l’accident, ou de 3 mois après la réception de la demande d’indemnisation par la victime, avec certaines exceptions. Un retard dans ces délais entraîne une augmentation de l’indemnité, le taux d’intérêt légal étant doublé pour la période écoulée entre la demande et la proposition.
Cette indemnisation est destinée à la victime, à ses héritiers en cas de décès, à ses partenaires (PACS, concubin, époux) ou à son représentant légal.
La victime a le choix d’accepter, de négocier ou de refuser l’offre. Elle n’est pas limitée dans le temps pour prendre sa décision. Lors du premier contact, la compagnie d’assurance doit informer la victime qu’elle a le droit d’être accompagnée d’un médecin ou d’un avocat. Cette assistance peut être cruciale pour évaluer l’adéquation de l’offre avec les préjudices subis.
- En cas d’acceptation de l’offre, un accord est signé entre les parties et le paiement doit être effectué dans les 15 jours suivant la signature.
- Si la victime refuse l’offre, elle peut soit demander une nouvelle proposition (par courrier recommandé avec accusé de réception), soit entamer une procédure judiciaire pour obtenir une indemnisation équitable.
Le montant de l’offre d’indemnisation est basé sur la part de responsabilité de la victime dans l’accident, la question étant de savoir si une faute inexcusable a été commise et si cette faute est la cause exclusive de l’accident. Si la victime est également le conducteur, il est vérifié si une faute a été commise par celui-ci. De plus, l’assurance prend en compte les montants déjà versés ou à verser par des tiers payeurs comme les caisses d’assurance sociale, les caisses de retraite, les employeurs, etc.
Il est possible de s’informer sur les indemnisations attribuées aux victimes d’accidents de la circulation via le fichier des Victimes Indemnisées (FVI), tenu par l’Association pour la gestion des informations sur le risque en assurance (Agira).
L’indemnisation des conducteurs
Selon la nature de la faute et le niveau de couverture, l’indemnisation du conducteur varie. Elle sera inexistante si la faute est intégralement imputée au conducteur, et seulement réduite si la responsabilité est moins établie. Le type de garantie impacte également l’indemnisation. Par exemple, un conducteur fautif sans une couverture pour « dommages subis par le conducteur du véhicule » (souvent le cas avec une assurance au tiers) ne recevra pas d’indemnisation.
Les non-conducteurs sont toujours priorisés. Bien que la loi s’applique aussi aux conducteurs victimes, les conditions sont moins favorables que pour les non-conducteurs, car le conducteur est responsable du véhicule qu’il manie. En cas d’accident impliquant plusieurs véhicules, un seul assureur, désigné par les autres, procède à l’indemnisation au nom de tous.
Quelles démarches pour être indemnisé avec la loi Badinter ?
Après un accident de voiture, personne ne veut attendre des mois et des mois avant d’être pris en charge, surtout face à un événement aussi traumatisant. Voici la marche à suivre :
- Déclarez l’accident dans les 5 jours ouvrés pour initier le processus d’indemnisation. Si possible, remplissez un constat amiable sur les lieux, en y joignant : le nom et le numéro de votre contrat d’assurance, les date, lieu et circonstances de l’accident, et le cas échéant, les noms et adresses des témoins.
- Votre assurance envoie une première notification comprenant des précisions sur vos droits, y compris l’accès à une assistance (choix du médecin, avocat, procès-verbal, etc.). Un formulaire à compléter vous sera fourni si vous avez subi des dommages corporels, à retourner sous un délai maximal de 6 semaines.
- L’évaluation de la gravité des préjudices corporels nécessite un examen médical, que vous devez réaliser (sur la base de documents existants ou d’une expertise médicale) : cela aboutit à un rapport d’expertise qui vous est envoyé sous 20 jours maximum.
- Une proposition d’indemnisation vous est faite, considérant votre part de responsabilité dans l’accident ainsi que les montants déjà versés ou à verser par les tiers. Cette offre doit vous être faite sous 3 mois suite à votre démarche, et sous 8 mois après l’accident si l’étendue de votre préjudice n’a pas encore été pleinement évaluée ou si la responsabilité n’est pas clairement définie.
- Trois options s’offrent à vous : accepter l’offre et recevoir l’indemnisation sous 45 jours, refuser et demander une nouvelle proposition à votre assurance, ou refuser et porter l’affaire devant la justice.
Que dit la loi Badinter sur l’implication de piéton dans un accident de la route ?
Cette législation inclut les piétons dans la catégorie des non-conducteurs susceptibles de subir des préjudices lors d’accidents de la route avec un ou plusieurs véhicules motorisés terrestres. Les préjudices physiques subis par le piéton sont intégralement compensés, à moins que celui-ci n’ait volontairement causé le dommage ou commis une faute inexcusable. Si un piéton traverse la route alors que le feu pour piétons est au rouge, cela ne constitue pas une faute inexcusable : il recevra une indemnisation.
Cependant, si l’incident arrive sur une voie exclusivement destinée aux véhicules et que le piéton a franchi des barrières ou toute autre forme de sécurisation, cela est considéré comme une faute inexcusable : le piéton ne sera dès lors pas indemnisé. Peu importe la nature de la faute inexcusable, elle n’est pas prise en compte si la victime a moins de 16 ans, plus de 70 ans ou une invalidité supérieure à 80 %.
Néanmoins, le piéton est tenu responsable des dégâts occasionnés aux véhicules : son assurance Responsabilité Civile interviendra pour couvrir ces dommages.
Si la personne responsable de l’accident n’est pas assurée, ou n’a pas été identifiée, le Fonds de Garantie des Assurances Obligatoires de Dommages intervient pour indemniser les victimes. Ce fonds peut aussi être sollicité par d’autres victimes, telles que les cyclistes, les conducteurs, etc. Avant l’adoption de cette loi le 5 juillet 1985, les piétons n’étaient pas systématiquement pris en charge en cas d’accident de la route.